Ksar El Barka - Nomadays

Mauritanie

Ksar El Barka

Ksar El Barka est une cité historique située sur la commune de Tamourt N’ Naaj (ex commune de Nbeïka), à 60 km  au NNE du chef-lieu, Moudjeria

C'est un site archéologique où subsistent de nombreux vestiges d'un village fortifié fragilisés par les effets du temps et le pillage des hommes.

Son architecture est particulière et caractéristique de la région avec ses épais murs de pierre crépis d’argile (banco) aux niches triangulaires ou cloisonnées.

Ksar el Barka fut créé par les Kunta venus de Wadan en 1690. Sa fondation serait, en ce cas, postérieure, d’une part à l’invasion du Tagant par les arabes Mâquil au XVIe siècle, d’autre part à la disparition des empires du Niger à la fin du même siècle (1591 : conquête du Songhaï par le sultan du Maroc).

Son fondateur, l'Imam Taleb Sid’Ahmed Ben Bajed, n'appartenait pas pour autant aux premières générations Kunta venues au Tagant car le tombeau de son père Bajed, celui de son grand père, Sidelemin et même celui de son arrière grand-père, Sidi Haiballah, se trouvent tous au Tagant. Ce dernier est à Legbour, 24 km à l'ouest de Tidjikja, mais le premier projet de sédentarisation des Kunta au Tagant fut incontestablement celui de Ksar El Barka.

Cette cité s’est avérée d’un grand intérêt patrimonial de par la diversité et le nombre des manuscrits identifiés et répertoriés chez les ressortissants de ce bourg presque oublié.

Ksar Elbarka occupe un site remarquable, sur la rive nord de l'Oued el Abiod, affluent majeur du lac Gabou, vaste dépression où viennent se rassembler une large part des eaux de surface du Tagant.

La bourgade est placée sur l’une des passes du plateau du Tagant, sur la route des caravanes allant du Maroc, de la Méditerranée et de l’Atlantique à Walata et au Mali, en passant par l’Adrar au Nord et Tichit à l’Est.

Cette situation explique, semble-t-il, l’existence de la cité et son ancienne prospérité, elle donne aussi à penser que le lieu s’est trouvé occupé dès une époque fort ancienne ainsi qu’en témoignent les  nombreux sites néolithiques, et les multiples peintures rupestres observables alentour.

Mais aussi les ruines qui subsistent sur les collines rocheuses voisines, celles d’Anekch al Akhall et d’Anekch al Abyadh, à l’Est des précédentes, toutes se trouvant à 5 km environ au sud du bourg.

Au long de l’oued, la mise en valeur des terres agricoles et l’importance des palmeraies constituèrent la base du dynamisme de cette cité commerçante que les caravanes sahariennes fréquentaient avec régularité.

Ksar El Barka fut aussi un centre de rayonnement culturel qui abritait poètes, savants et érudits. Les prestigieuses médersas des Ahl Moulay Eli Ould Moulay Rchid, Ahl Chekh Ould Mmenny, Ahl Taleb Ebbat, Ahl Adoubba, Ahl Elghadhi, Ahl Khayne et bien d'autres y propageaient sagesse et savoirs.

Mais la sanctuarisation définitive de Ksar El-Barka, intervint lors de la visite, de Cheikh Sid’el Moctar El Kounti, figure émérite et savant hors pair, illustre refondateur de la Voie Quadirya, venu de l'Azawad pour glorifier le Ksar, en 1753.

A partir de 1820, la guerre qui opposa les Kunta aux Ahl Sidi Mahmoud et aux Ahl Mohamed Cheïne, aboutit en 1822-1823 à la destruction de Ksar el Barka et de Rachid (palmeraie voisine fondée par les Kunta en 1723), épisode malheureusement suivi d’une épidémie de variole sur l’ensemble du Tagant.

Ultérieurement, en 1892-1893, Ksar el Barla fut le théâtre d’un combat qui opposa les Kunta aux Zenaga (Idaw’ish) qui, défaits, y perdirent 17 notables des Ahl Mohamad Cheïne.

Toutefois, les diverses destructions furent assez rapidement suivies par la reconstruction (au moins partielle) du Ksar par ses habitants.

En février 1905, les forces d'occupation françaises, sous les ordres du Délégué Général de l'Administration Coloniale, Xavier Coppolani, occupèrent Ksar El-Barka, et y construisirent un bâtiment fortifié tenant lieu de réservoir de céréales destiné à l’approvisionnement des troupes françaises installées à Tidjikja.

En 1914, l'Administration coloniale accéda à un vieux désir du chef tribal de l'époque, Sid Mhammed Ould Sid’ahmed Ould Ahmed, de reconstruire partiellement la cité dont il vécut la dernière destruction. C'est ainsi que la mosquée fut restaurée, une centaine d'habitations reconstruites et plusieurs points d'eaux créés au sein des diverses palmeraies  établies sur les rives de l'Oued.

(les photos aériennes des vestiges sur Google, permettent aisément de distinguer l'ampleur de la cité originelle par rapport à l'espace, quelque peu,  reconstruit)

Mais cet effort de renaissance se trouva bientôt compromis par l’apparition de nouveaux moyens de transport et de communication, tant maritimes que terrestres.

L’essor de ces nouvelles voies commerciales, vint tarir le commerce caravanier et la région du Ksar, progressivement, se vida de ses habitants, dont une partie vint, dès la fin des années 1950, lors de la construction de la passe de Moudjéria (entraînant le contournement routier définitif de Ksar-El-Barka) se fixer à Nbeika.

En août 2015, lors d’une grande cérémonie organisée par la commune, la cité historique reçut la (première) visite d'un Ministre de la Culture de l'État Mauritanien, qui aboutit à son classement au patrimoine historique national, en date du 1er décembre 2015.

Un programme de protection et de sauvegarde de la cité, mis en place par le Gouvernement, est actuellement en cours de réalisation.

 
Texte Bruno LAMARCHE, Abdelweddoud Ould Cheikh pour Détours Mauritanie Voyages 

Croquis : D. Jacques Meunié