Des murs en brique de ciment, des toits de cases en feuilles de tôle, des plans architecturaux sans relief : c’est le triste visage qu’offre aujourd’hui aux visiteurs le célèbre village touristique Taneka Beri au nord du Bénin. Il s’opère sous nos yeux impuissants une mutation vers une certaine modernité. Le mode de vie actuel exerce une pression énorme sur ce joyau niché dans les montagnes de l’Atacora, au cœur de la commune de Copargo.

Partout souffle le vent du progrès qui risque de balayer tout le passé glorieux des valeureux guerriers du peuple Taneka.

Conséquence de ce modernisme : toute l’architecture, originale et unique, de ce peuple tend à disparaitre. Les cases circulaires aux murs épais et aux motifs artistiquement imprimés, les toitures coniques en pailles, le tout disposé de façon magnifique offrant une vue aérienne de carte postale, se meurent.

  Village Taneka en pleine mutation

C’est l’âme de ce peuple qui est menacée de disparition ; c’est l’identité de cette population qui s’efface. 

    Afin de sauvegarder le patrimoine en péril, il urge de mener des actions idoines. Un méga projet de protection pourrait prendre en compte :

Un vaste plan de sensibilisation des populations concernées, notamment la jeune génération, sur l’importance de préserver cette richesse culturelle et touristique des villages Taneka, 

Une motivation et un encouragement de diverses sortes aux personnes disposant encore de cases traditionnelles. Il urge de les aider à les conserver malgré les assauts de la modernité, 

La nécessité si besoin est de créer un village tampon à défaut de tout protéger (sur les trois villages, le coté est déjà totalement transformé),

Un financement conséquent de projets de reconstruction d’un nombre considérable de cases traditionnelles dans les villages, 

Une espèce de modernisation des habitats par le dispositif de panneaux solaires.

  Un spectacle désolant... 

C’est à ce prix que le joyau architectural, voire tout le patrimoine matériel des villages Taneka pourra échapper à la disparition programmée.

Comment en est-on arrivé à cette accélération de l’usage de la matière tôle dans la toiture ?

Trois raisons fondamentales peuvent être évoquées. 

- La première est la rareté de paille. Autrefois, on pouvait en récolter partout, dans les champs, aux abords des voies et même derrière les cases. Aujourd’hui, avec la sécheresse cyclique et surtout le phénomène de la transhumance persistante (les troupeaux de bœufs, de vaches et de moutons qui traversent chaque année le territoire, broutent sauvagement les pailles) la paille devient un matériau très rare ; 

- La deuxième est la recrudescence des incendies qui ravagent une partie du village chaque année laissant les habitants dans la détresse. Beaucoup de villageois sont fatigués de tout perdre chaque fois en une seule nuit à cause d’un incendie dévastateur. Les feux de brousse précoces et les feux provoqués par les chasseurs sont sources de ces incendies.  

- La troisième reste la volonté de la jeune génération attirée par les mirages de la modernité et soucieuse de vivre comme des citadins. Elle est décidée à transformer son milieu. Elle a grand soif de la technologie et du confort que la technologie offre.

  Un dignitaire à Taneka Béri 

Il urge d’agir pour limiter les dégâts. 

Nous appelons les autorités locales, la mairie de Copargo, le gouvernement béninois et l’Unesco à œuvrer ensemble pour sauver les villages Taneka qui constituent une attraction touristique incontournable au Bénin. 

Isaac Akotchayé ABISSI